lundi 15 mai 2017

Métro parfum

Métro Parfum


Sous la peau de béton des cités anonymes,
Courent de chaudes veines baignées d'un sang d'ombre.
Les lumières s'y perdent, et le temps y sombre,
Et des vies s'y écoulent en torrents infimes.

Quelques pieds sous terre, plus proches de l'enfer,
Y entrent inconscients des robots inconnus,
Aimantés par le noir, enivrés par le flux,
Ils fondent et oublient un autre jour souffert.

Peurs distillées, jus mélangées,
Regards perdus des disparus,
Âmes happées, évaporées,
Sous l'avenue, des diables nus,
Respirent l'ombre et se noient,
Ils disparaissent un à un,
Vers un ailleurs, vers un chez soi,
Restent vapeurs, métro parfum.

Les vicieux innocents, crime d'humanité,
Se punissent de tout dans ces longs purgatoires,
Et parmi d'autres diables, se sentant aimés,
Ils se cachent de ce qu'ils s'efforcent de croire.

Mais le sous-sol est froid, et l'enfer est en eux,
Brûlant l'un contre l'autre, ils réchauffent la ville,
Un sang commun emplit le vide de leurs yeux,
Il nourrit malgré lui le monde qui défile.


Corps contre corps, désincarnés,
Yeux grands fermés, à cœur perdu,
Croulant sous le poids des années,
Sueurs froides pour fièvres tues,
Se mélangent et se revoient,
Se reconnaissent un à un,
Dans la vitre mille autres soi,
Suent de concert, métro parfum.

Ils entrent presque morts, ressortent transformés,
Dans un autre décor, et sans un au revoir,
Pour hier, pour celui que l'on vient de quitter,
Celui qu'on a laissé s'oublier dans le noir.

Ils se voient clairement lorsqu'ils ferment les yeux,
Dante les attira dans ces antres sublimes,
Le vacarme des rails étouffent leurs aveux,
Et ils ne sont chez eux qu'en ces fiévreux abîmes.

Des corps perdus, désavoués,
Flottent au gré de cette crue,
Coulant un peu pour respirer,
Pour se perdre dessous les rues.
Et les enfers les renvoient,
Vers la surface un à un,
Ils y sont seuls, ils y ont froid,
Mais transpirent métro parfum.

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