dimanche 10 février 2019

Trois moi d'hiver

Trois moi d'hiver


Le premier moi sent le roussi, la peau cramoisie par l'été,
Le premier moi sent le sapin, les cierges d'or, l'encens brûlé.
Sans ces subtiles sensations, le premier moi s'enterrerait
Et les monceaux de feuilles d'or, son beau cercueil décoreraient.

Le premier moi passe sa vie à recoudre les mois passés,
Le premier moi s' évanouit dès que le fil est arraché,
Au coin d'un an égratigné, quand le présent se fait archive,
Fumant près d'une cheminée, c'est l'au delà sur l'autre rive.

Je lutte ces longs mois d'hiver,
Contre l'armée des moi divers,
Mois après mois je cherche un toit,
Mais tu attends un autre moi,
Le froid détruit les moi sans toi,
Mais je survis un autre mois.
Lui, l'autre moi qui luit en toi,
Fuit la folie de mes émois .

Le second moi est en abysses, et profondeurs inconnues,
Le second moi sans cesse sonde les enfers et les nues,
Un tronc assoiffé de lumière péniblement distille sève,
Et d'autres fluides toxiques, d'autres boissons qui achèvent.

Le second moi passe sa mort dans un délire de nature,
Le second moi vit enfermé dans un ciel taché de ratures,
Ciel et charbon mêlés toujours, l'un coulant sur l'autre qui fume,
Je savoure la mort à l’œuvre, attendant l'aube posthume.

Je lutte ces longs mois d'hiver,
Contre l'armée des moi divers,
Mois après mois je cherche un toit,
Mais tu attends un autre moi,
Le froid détruit les moi sans toi,
Mais je survis un autre mois.
Lui, l'autre moi qui luit en toi,
Fuit la folie de mes émois .

Troisième moi, un inconnu, un perpétuel étranger,
Troisième moi, hypothétique, un universel réfugié,
Une rafale incertaine dérègle les cadrans solaires,
Me déracine, me propulse pour un autre tour de terre.

Troisième moi s'échappera vers son inévitable destin,
Troisième moi vivra, verra, croira faire choix et festins,
Buvant à la source le sang coulant de ses propres blessures,
Il ne fera que son portrait, car l'autre moi n'est jamais sûr.

Je lutte ces longs mois d'hiver,
Contre l'armée des moi divers,
Mois après mois je cherche un toit,
Mais tu attends un autre moi,
Le froid détruit les moi sans toi,
Mais je survis un autre mois.
Lui, l'autre moi qui luit en toi,
Fuit la folie de mes émois .

1 commentaire:

Guillaume BLANCHARD a dit…

Ces vers m'ont tout simplement ému. Au delà du jeux des mots, il y a à la fois une violence dans les sentiments et une véritable passion. Très heureux de découvrir ton talent.