L’œil ne quitte pas l’œil, horizons l'un pour l'autre,
Éternellement vierges, infiniment sages,
Adam et
Eve veillent, ils sont tous les apôtres,
Et sous
la peau d'argile, le cœur ne prend pas d'âge.
Sur
leurs corps pétrifiés courent des doigts sensuels
Les
cheveux décoiffés flottent encore au vent,
Leur
courbes se marient en noces éternelles,
Quand
les artistes s'aiment, le paradis attend.
Au cœur
des villes grises, où l'homme ne voit pas,
Les
couleurs se reposent dans l'atelier d'artiste,
Pour
donner aux aveugles quelques tubes de joie,
Ici un
Dieu d'amour repeint l'horizon triste.
Armé de
ses pinceaux, il combat l'invisible,
Démasque
la beauté cachée dans la grisaille,
Et
lorsque les couleurs recouvrent l'impossible,
Ses
rêves ses visions s'écoulent sur la toile.
Tout le
long des années, des enfants dessinés,
Se nourrissent des regards que l'on offre au passé.
Les
yeux figés observent, puis toujours redonnent,
Cet
amour infini reçu de la Madone.
L'image
dans mes yeux, et qui nous survivra,
Moi seul
dans l'atelier et toi étendue là...
Quand le
présent s'endort, le peintre vit de songes,
Tu dors
les yeux ouverts, et les instants s'allongent.
Te
souviens-tu encore, depuis ton autre monde,
Des
mondes fantastiques que nous rêvions ensemble ?
L'amour
en noir et blanc, où les amants se fondent,
Et les
yeux colorés d'enfants qui nous ressemblent ?
Tous les
mots oubliés, le temps me les rapporte,
Et les
amours passées aujourd'hui se regardent,
Qui dit
amours passées ne dit pas amours mortes,
Dormant
dans nos tableaux, la romance s'attarde.
Grandi
par la fierté des animaux sauvages,
Le
sphinx d'ocre roux règne sur les images,
Les
visions volatiles sont gravées dans la pierre,
Et la
trivialité déjà quitte la Terre.
Des
formes fantasmées s'écoulent des légendes,
Les
mythes fondateurs apportent leurs offrandes.
La roche
se nourrit de la mythologie,
Et le sphinx de pierre s'envole dans la nuit.
Et quand
un jour nouveau pénètre l'atelier,
Quand la
lumière pâle caresse le papier,
Le futur
endormi s’éveille lentement,
Sous le
regard aimant d'une vierge à l'enfant.
De ses
yeux noirs et blancs s'envolent des oiseaux,
Qui
traversent le temps et survolent le port,
Une
Bretagne nue naissant sous le pinceau,
Où
lignes et couleurs s'aiment après la mort.
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