dimanche 7 février 2016

L'homme lit

L'homme lit
Du corps décomplexé, de la force de l'âge,
La maladie se moque, et son libertinage,
Ne connaît de frontière que le trépas final,
Répand de lit en lit, ses passions viscérales.

Murmurant sur son lit, étendu gravement,
Esclave d'une fièvre, l'homme prête serment.
Sur son corps se déversent des flots de gravité,
L'esprit est prisonnier d'un corps abandonné.

L'homme-lit s’alanguit, baignant dans sa sueur,
Et l'âme se délie quand le corps s'évapore.
Dans le lit absorbant où l'homme nu se meurt,
Des mondes inconnus naissent dans la torpeur.


Pour un temps, une maladie,
Amant d'un livre, amant d'un lit,
Tomber du monde lentement,
Lire le monde en attendant.
Apprivoiser la vie sauvage,
Et la laisser au gré des pages,
Guérir nos yeux, guérir nos maux,
Et montrer du doigt chaque mot.
Les autres partent en voyage,
Vers la fortune, vers le naufrage,
L'homme-lit flotte sur les heures,
Les jours fiévreux sont ses auteurs.


L'homme lit librement, alité littéraire,
Des romans idéaux décorent ses paupières.
Les yeux fermés il lit, et son esprit romance,
Les histoires insensées que dicte la démence.

La fièvre poétique, du matin au soir,
Ecrit sur l'écran noir où le réel trépasse.
Et sur les pages blanches de sa faible mémoire,
Le génie apparaît, et dans l'instant s'efface.

La maîtresse torride l'enlace et le quitte,
A chaque instant le trompe, le condamne et l'acquitte.
Les paupières épuisées par les fiévreux délires,
Sur une vie trop sage finissent par s'ouvrir.

Pour un temps, une maladie,
Amant d'un livre, amant d'un lit,
Tomber du monde lentement,
Lire le monde en attendant.
Apprivoiser la vie sauvage,
Et la laisser au gré des pages,
Guérir nos yeux, guérir nos maux,
Et montrer du doigt chaque mot.
Les autres partent en voyage,
Vers la fortune, vers le naufrage,
L'homme-lit flotte sur les heures,
Les jours fiévreux sont ses auteurs.

L'homme lit lentement, il dort les yeux ouverts.
Il flotte sur le jour, inondé de lumière,
Les livres par milliers entrent par la fenêtre,
Se posent sur le lit et lui racontent l'être.

Page à page dans le défilé des nuages,
L'homme-lit s'extasie et voit grandir son âge.
Enchaîné à la vie par une santé fière,
Forcé de voir le monde, et d'observer la guerre.

Le temps son ennemi, cet assassin fidèle,
Posé au coin du lit, le fixe un instant,
Lui parle calmement : «Pour les hommes mortels,
Rien n'est jamais trop long, rien n'est jamais trop lent. »

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