samedi 8 février 2014

Jardin d'hiver



«  Que sont devenues les fleurs, du temps qui passe,
Que sont devenues les fleurs, du temps passé... »
Quand se perdent au jardin, mes années lasses,
Quand des fleurs n'y restent que senteurs oubliées.


Quelle est la brume bleue, invisible et opaque,
Qui coule sur les jours et recouvre le temps ?
C'est l'odeur du silence, qui flotte dans vent,
Et au matin blafard, l'absence qui attaque.


La nudité émue du jardin écorché
Soupire doucement dans les bras du silence,
A son amant muet, livre ses confidences,
Et dans ces bras discrets, je te revois danser.


Et l'on s'entend valser, dans ce jardin d'hiver.
Quand les chants ont fané, on sent à chaque pas,
L'harmonie se figer, les accords se défaire,
La main du partenaire se meurt entre nos doigts.


Dans le jardin des morts, ou le passé s'enterre,
Des verrous aux paupières, tous les matins tu erres,
La solitude dort, tenant ta main fidèle,
Et sous ta peau transie, brûle l'aube nouvelle.


Et le sol est meurtri comme aux champs de bataille,
Par les assauts du froid, et criblé de mensonges.
Les lames de l'oubli, dessinent leurs entailles,
Mais jamais ne traverse l'armure de tes songes.


Marchant a tes cotés,et ses pas dans les tiens,
Cet artiste maudit, qui sculpte ton destin,
Sur œuvres tu pars, et tes pas dans les siens,
Les yeux fermés tu vois le printemps qu'il te peint.


Tu vois la rose rose, au parfum délicat,
de ces roses anciennes, enfin, tu la revoit,
Tu t 'en souvient plutôt, et ta gorge se serre,
Car il ne reste rien, des roses en hiver.


Et tombent sur tes mains, en flocons gris cendrés,
Les cendres de l'été, les cendres du passé,
Les rires et les couleurs, les cris et les douleurs,
La vie qui inondait, qui souvent faisait peur.


Et puis cesse la neige au jardin incendié,
Le monde redevient ce tableau noir et blanc,
La rose et son parfum regagnent le printemps,
Et tu ouvres les yeux sur ce huit février.


Tu emplis tes poumons, une première fois,
Germant dans le silence, tu reconnais ta voix,
Tu entends ce langage, ces mots évidents,
Ces poèmes dictés par la lenteur des ans.


Alors l'hiver pour toi, ne peut être trop long,
Tu vois aux branches nues s'accrocher les passions,
Tu regardes la vie qui tendrement se rend,
Qui dépose les armes et s'éteint calmement.


Car dans le jardin blanc poussent pendant l'hiver
Des plantes sans racines et aux fruits succulents,
Et dont les floraisons allègent les paupières,
Diluent les horizons, étirent les instants.


Ils vivent très heureux, et en dehors du temps,
Ceux qui aiment l'hiver, et savent encore lui dire,
« Reste, reste toujours, quand le jardin soupire,
En février, je nais, et le futur est blanc ».