vendredi 15 février 2019

Six pieds sur terre

Six pieds sur terre


Les yeux bandés au bord du temps,
Ivre de mer je somnambule,
Ma peau écorchée par le vent
Saigne des rêves, saigne des bulles.

Prendre l'histoire à l'envers,
Vieillir jusqu'à son origine,
Comme la buée sur le verre,
N'est jamais ce qu'on imagine.

Debout au bord de la falaise, le bout des ongles dans le vide,
Vivre cet infini malaise d'être la proie d'un cœur avide.
Et faire naître à chaque pas sous son corps un chemin d'éther,
Et respirer loin du trépas, enseveli six pieds sur terre.

Toujours faire rouler le monde,
Sous les pieds nus et affamés,
Et avaler chaque seconde,
Sans jamais le destin blâmer.

L'univers revient à sa place,
Quel est ce hasard insistant,
Cette prophétie qui nous glace,
Et fait plier tous les titans ?

Debout au bord de la falaise, le bout des ongles dans le vide,
Vivre cet infini malaise d'être la proie d'un cœur avide.
Et faire naître à chaque pas sous son corps un chemin d'éther,
Et respirer loin du trépas, enseveli six pieds sur terre.

L'inconnu que j'ai embrassé
En tombant vers mes lendemains,
Attendait les années passées
Que ma vie croise son chemin.

Prisonnier de mon atmosphère,
Repoussé par la froide terre,
Écrasé sous des tonnes d'air,
Pourtant plus rien ne m'indiffère.

Debout au bord de la falaise, le bout des ongles dans le vide,
Vivre cet infini malaise d'être la proie d'un cœur avide.
Et faire naître à chaque pas sous son corps un chemin d'éther,
Et respirer loin du trépas, enseveli six pieds sur terre.

Dans cet espace ridicule,
J'écrase sous mes pieds les astres,
J'avance, l'horizon recule,
S'évanouissent les désastres.

Et ce voyageur inconnu
Sillonne l'onde sans relâche,
Et cicatrisent ses pieds nus,
Jusqu'à l'instant où son cœur lâche.

dimanche 10 février 2019

Trois moi d'hiver

Trois moi d'hiver


Le premier moi sent le roussi, la peau cramoisie par l'été,
Le premier moi sent le sapin, les cierges d'or, l'encens brûlé.
Sans ces subtiles sensations, le premier moi s'enterrerait
Et les monceaux de feuilles d'or, son beau cercueil décoreraient.

Le premier moi passe sa vie à recoudre les mois passés,
Le premier moi s' évanouit dès que le fil est arraché,
Au coin d'un an égratigné, quand le présent se fait archive,
Fumant près d'une cheminée, c'est l'au delà sur l'autre rive.

Je lutte ces longs mois d'hiver,
Contre l'armée des moi divers,
Mois après mois je cherche un toit,
Mais tu attends un autre moi,
Le froid détruit les moi sans toi,
Mais je survis un autre mois.
Lui, l'autre moi qui luit en toi,
Fuit la folie de mes émois .

Le second moi est en abysses, et profondeurs inconnues,
Le second moi sans cesse sonde les enfers et les nues,
Un tronc assoiffé de lumière péniblement distille sève,
Et d'autres fluides toxiques, d'autres boissons qui achèvent.

Le second moi passe sa mort dans un délire de nature,
Le second moi vit enfermé dans un ciel taché de ratures,
Ciel et charbon mêlés toujours, l'un coulant sur l'autre qui fume,
Je savoure la mort à l’œuvre, attendant l'aube posthume.

Je lutte ces longs mois d'hiver,
Contre l'armée des moi divers,
Mois après mois je cherche un toit,
Mais tu attends un autre moi,
Le froid détruit les moi sans toi,
Mais je survis un autre mois.
Lui, l'autre moi qui luit en toi,
Fuit la folie de mes émois .

Troisième moi, un inconnu, un perpétuel étranger,
Troisième moi, hypothétique, un universel réfugié,
Une rafale incertaine dérègle les cadrans solaires,
Me déracine, me propulse pour un autre tour de terre.

Troisième moi s'échappera vers son inévitable destin,
Troisième moi vivra, verra, croira faire choix et festins,
Buvant à la source le sang coulant de ses propres blessures,
Il ne fera que son portrait, car l'autre moi n'est jamais sûr.

Je lutte ces longs mois d'hiver,
Contre l'armée des moi divers,
Mois après mois je cherche un toit,
Mais tu attends un autre moi,
Le froid détruit les moi sans toi,
Mais je survis un autre mois.
Lui, l'autre moi qui luit en toi,
Fuit la folie de mes émois .

dimanche 3 février 2019

Insolation

Insolation


C'est un beau jour d'été, un soleil au zénith,
La chaleur épicée, couchée sur le granite,
Nos ombres découpées sur le sable palpitent,
Et nos yeux éblouis, nos regards qui hésitent.

C'est cette lumière là, la cause de ma fièvre.
Mes rétines brûlées par nos amours trop brèves,
Mes lèvres desséchées par les mots que j'achève,
C'est janvier c'est juillet, c'est un amour sans trêve.

A cœur perdu sur cet autel offert,
Je m'évapore,
En volutes ambrées entre tes bras ouverts,
Je m'évapore,
Autour de moi les murs où l'on écrit
L'insolution,
Mais moi je m'évapore, je prie
L'insolation.

Aurore timorée ou bonheur virginal,
Premier rayon timide, pâleur matinale,
Tout aussi éblouis par ces amours bleues pâles,
Sur nos peaux dégelées poussent les fleurs du mâle.

Quand le soleil frémit au bout de la nuit noire,
Les pupilles tressaillent et les cœurs s'en vont boire,
Aux sources des promesses, l'aube portant l'espoir.
Les amours de rosée, brûleront jusqu'au soir.

A cœur perdu sur cet autel offert,
Je m'évapore,
En volutes ambrées entre tes bras ouverts,
Je m'évapore,
Autour de moi les murs où l'on écrit
L'insolution,
Mais moi je m'évapore, je prie
L'insolation.

S'en vient le crépuscule, la lumière faiblit,
Mon cœur à cheval poursuit l'astre qui luit,
Le soir me tient le pied, je n'ai pas peur de lui,
J'enroule à mon cou ce rayon qui s'enfuit.

Écharpé de l'amour qui devant moi cavale,
Je m'enivre du vent, de la nuit que j'avale,
Je vais te retrouver, au creux du prochain val,
Nuit tu n'éteindras pas nos brûlures estivales.

A cœur perdu sur cet autel offert,
Je m'évapore,
En volutes ambrées entre tes bras ouverts,
Je m'évapore,
Autour de moi les murs où l'on écrit
L'insolution,
Mais moi je m'évapore, je prie
L'insolation.

C'est juillet c'est janvier, saison ou heure morte,
Sous le ciel déserté, et le vent sous la porte
Veut apaiser ma peau, le soleil se déporte,
Mais la brûlure est là, la morsure trop forte.

Le soleil de l'été a traversé la peau,
Déjà l'insolation a gravé sur mes os.
Aucune obscurité, aucune trombe d'eau,
N'éteindra cet été qui brûle dans mes mots.