vendredi 25 septembre 2009

Les âmes blanches

Les voici alanguies dans leur traîneau d’argent,
Elles arrivent en glissant et remontent le temps.
Un parfum de passé embaumant leur sillage,
Les longues âmes blanches poursuivent leur voyage.

De fiers chevaux sauvages tirent ces souvenirs.
Indomptables, fougueux, ils mènent ce cortège,
Vers les steppes brumeuses où meurent les soupirs,
Le chant des âmes blanches étouffé par la neige.

Nous sommes les compagnons de ces maigres chimères,
Qui inlassablement volent vers la lumière.
Placides et patientes, elles flottent dans le vent
Vapeurs immaculées qui baignent leurs enfants.

Les tristes âmes blanches nous tournent le dos
Nous donnerions nos vies pour croiser leur regard,
Encore un jour, une heure, revenir au berceau
Repousser d’un instant le temps de l’au revoir.

Elles se tiennent droites dans le soleil d’été
Debout face à la mer, les âmes blanches prient.
Alors souffle le vent dans leur bras déployés,
Et gorgé de lumière il traverse la nuit.

Elles courent sur les vagues, déjà elles sont au large,
Les âmes blanches volent, et nous pleurons en vain.
Regardez les voguer, ces écumes sans âge,
Caressant nos visages où coulent les embruns.

Regardons la pousser, la forêt translucide,
Où se perdent trop tôt des journées embuées.
Le bois des âmes blanches, sous sa canopée,
Abrite l’arbre des anges, aux pâles fruits candides.

Les âmes qui voyagent, ces impressions troublantes,
Savent courir le monde sans nous lâcher la main.
Nous sommes leurs vaisseaux, flottant sur le chagrin,
Guidés dans le silence, dans les lumières changeantes.

Dans le calme matin, lueurs insaisissables,
Elles montent en vapeur et fondent dans le jour.
Alors les grands déserts, les noirs enfers de sable,
Voient fleurir sous les pierres des roses de velours.

mardi 15 septembre 2009

Le réveilleur

Le réveilleur parcourt les rues de pierres en chantant l’air de la misère. Un grand chapeau marron lui cache la lumière. Ses yeux –sait-on s’il en a- se sont noyés dans l’ombre et il marche la tête basse, fixant le sol qui défile sous ses pieds, entre moi et l’enfer. Ses pas sont prompts et secs, il sent ses pieds brûler, il n’apprécie rien de ce parcourt, de cette triste tâche qu’il reproduit machinalement. Le réveilleur allume sur son chemin de froides flammes, des lumières aveuglantes. Il glace les couleurs de son pas inhumain, le sillage du brise-rêves se relève en boitant, la nuit fanée repoussera-t-elle ?
Je suis cloué au lit, songeur paralytique, les yeux grands ouverts sur mon destin. Par les persiennes déjà pénètrent de froides lames. Ma fuite semble vaine, pourtant je me débats. Les couperets de lumière me tranchent, implacables, et je me terre dans un recoin de nuit pour ne pas avoir à ouvrir les yeux sur mes blessures à venir. Un repli de rêve me donne un court sursis. Désespéré je me saoule d’illusions, je sombre dans la folie d’un ultime délire, je sombre dans le déni. Je bâtis le long de mes paupières des murs opaques et denses, mais la lumière creuse mes yeux inexorablement. La mer monte. Le sable coule, les dunes sont rongées.
Le réveilleur est désormais dans ma rue. L’écho de ses pas rampe le long des immeubles. Ils arrivent à mon oreille, de moins en moins mourants, et leurs assauts incessants cognent à la paroi de mon cœur. Je sais qu’il vient pour moi, qu’il ne me ratera pas, qu’il ne m’oubliera pas cette fois.
Je tente de protéger ce qui compte encore. En laissant fuir ceux que j’aime, en leur épargnant un combat perdu d’avance, c’est une partie de moi que j’évapore, que j’ennuage, que je dissimule ou que j’enterre. Je m’allège de tout ce que j’aimais pour partir au combat vierge de craintes. J’y partirai seul et j’y partirai nu. Je me répète obstinément les noms, les lieux où j’ai laissé mes trésors, pour ne pas les oublier lorsque la fièvre montera, lorsqu’en vagues furieuses déferlera la folie. Dans ma prochaine peau, ces rêves auront-ils encore cours ? Les cicatrices qui fermeront mes blessures fermeront-elles mes yeux à ces mondes que je quitte ?
Le réveilleur à présent est au bas de l’immeuble. Il entre sans frapper, comme un brouillard brûlant, sans rien se demander, et sans rien ressentir. Il ne se déplace pas, il se répand, comme une armée d’innombrables flammes, d’innombrables lames. La marée d’armes blanches grignote une à une les marches de l’escalier. Je sens, encore très loin sous moi-même, monter ce flot acide. Le réveilleur est ponctuel, l’obstacle lui semble étranger. A chaque étage, dans chaque chambre, j’entends le son des batailles, j’entends la musique militaire, j’entends le glas résigné.
J’enveloppe dans un coin de drap blanc tout le temps qu’il me reste. Je le serre, je l’enlace, j’entasse dans ce tout petit temps ce qu’il me reste à faire. L’accélération des choses, leur chute libre, leur sacrifice, déforme tous les axes. Les valeurs fluctuent, des instants insignifiants sont étirés à l’infini, comme une note unique et obstinée capturée dans une musique. Des éternités sont guillotinées froidement, si simplement. Des poussières nous écrasent, poussant soudain comme des gratte-ciels.
Le réveilleur est sur le pallier de ma porte. Pour la première fois il semble marquer une pause. En moi l’horloge danse, les aiguilles du temps tricotent et s’entrechoquent. Je vois la lumière du réveilleur ramper sous ma porte, un long reptile qui flaire sa proie endormie. Je sens sa main peser sur la poignée de la porte. Elle pèse en même temps sur ma poitrine.
L’appui se relâche et la lumière faiblit.
Le réveilleur soupire et tourne les talons.
Je reste sur mon lit, le thorax affolé, et je sens sur mon cœur l’empreinte du réveilleur. Dans de sa main quelques lignes, tatouées sur ma peau. J’ai pu lire quelques mots. Le réveilleur m’a épargné. Le sang glacé, mes pieds bleus de peur machinalement suivent sa trace, et je parcours en somnambule le monde réveillé.

dimanche 6 septembre 2009

Ma nuit bleue

Par une nuit trop bleue où j'attendais l'aurore,
Alors que ma bougie approchait de sa mort,
Un plaisir étranger surprit mon insomnie
La triste lune au ciel enfin m'avait sourit.

Ses grands yeux trop pâles pleuraient des flots d'argents,
Je brillais sous le feu d'un regard bienveillant
Cette rondeur enfin s'écoulait sur mes plaies,
Suffoquant de tendresse, la lune souriait!

Dans le silence pieux de cette nuit d'opale,
la lune prit ma main et apaisa d'un mot,
Le trouble de mes jours, la fièvre de mes maux
un mot qui dans la nuit luisait comme l'émail.

"Crois tu mon cher enfant, que le beau est lumière?
Et qu'il faut pour aimer garder les yeux ouverts?
Tu te morfonds toujours en attendant le jour
Maudissant le sommeil qui te prive d'amour...
Si au moins tu voyais, dans la nuit de velours,
Que quelqu'un dans le noir espère ton retour.

Je sais mon bel enfant, comme les lunes savent,
que loin de ton regard, un chant divin te berce.
Et je pleure en volant la cantate suave
Que ton ange gardien sur le monde déverse.

Je sens sur mon dos rond couler, ce flot d'amour
chacune de ses goutte fait croitre mon sourire
Et toi tu restes sourd, et tu n'es que soupirs
Mes larmes t'indiffèrent et tu attends le jour.
Pourtant un ange t'aime, je voulais te le dire,
Il fallait que tu saches que le bonheur t'attend,
qu'il murmure déjà, qu'il va bientôt fleurir
Si tu ne le vois pas, j'espère que tu le sens.

Tu peux fermer les yeux, et rêver qu'il est là,
Tu peux crier au ciel, ce que tu veux lui dire,
Tu peux lancer là haut tes grands yeux pleins d'éclat,
Et en écoutant bien, tu peux l'entendre rire"

Au cœur de ma nuit bleue je valse sur les dunes.
Je suis le roi d'un soir sur son bateau de joies,
Voguant vers le pays que m'a promis la lune,
Et je pense en chemin, qu'aussi tu penses à moi.


Et dans la nuit d'azur, j'entends rimer les anges,
je reconnais au loin l'écho de mes louanges,
se pourrait il qu'enfin ces perles me reviennent,
Et qu'une nuit prochaine ces paroles soient tiennes?

mercredi 2 septembre 2009

L'éternel retour

Et c'est reparti pour les correspondanses! vive la rentrée!

L’éternel retour
Musique:



Amour d’hier,
Je revis chaque soir nos nuits de velours
Rose d’hiver,
Mon corps toujours attendra ton retour

Vaines prières,
Mes mots perdus, au ciel, te cherchent toujours
Et moi à terre, pauvre fou,
J’attends en vain ton éternel retour.

Comme un spectre dans la nuit,
Comme un rêve qui s’enfuit,
Tu m’embrasses chaque soir,
Tu disparais dans le noir

Ma longue peine, mon sursis,
Je suis ta trace, comme un loup dans la nuit
Et mon regard, dans le miroir,
Fixe en silence ton absence.
Mon œil hagard garde l’espoir
Naïf et insouciant

Mon obsession
Fait naître en moi des flots de passion
Pauvre garçon
Qui répète ton nom
Ne vit que pour ton retour
Accroché à l’horizon
Il écume les jours

Il danse seul sur un lit de poussière
Il danse seul sur un lit de poussière

Comme un spectre dans la nuit,
Comme un rêve qui s’enfuit,
Tu m’embrasses chaque soir,
Tu disparais dans le noir

Comme le pire de mes remords,
Comme un précieux anneau d’or,
Tes yeux m’ont jeté un sort,
Ton souvenir me dévore

Comme l’aube chaque matin,
Nous promet un lendemain,
Je sais que viendra le jour
De ton éternel retour.
Les yeux fermés
J’entends tes pas franchir les mondes qui nous séparent
Et tu avances dans le noir
Lentement tu passes la porte du soir.

J’ouvre les yeux,
Au loin déjà s’envole un ange amoureux
Un ange sourd
Qui n’entend pas mes chansons d’amour.