City Lights
Bien avant mon réveil j'empreinte chaque jour
les trottoirs argentés qui drainent mes espoirs
et j'entends résonner les pavés de velours
Que mon regard éteint couvre d'une ombre noire.
Je croise ma silouhette mille fois répliquée
sur les vitraux laiteux d'églises grillagées
Mes réflections et moi envahissons la ville
Et je sens dans mon dos les clones en longue file.
J'ai quelques fois rêvé que je me retournais
que je m'arrêtais net sur le sentier de guerre
Eteint sur le trottoir je redoute l'arrêt
Et le regard de ceux que j'ai laissé derrière.
Je le vois derrière moi, ce doigt accusateur
cette image figée, ce slogan incendiaire
Qui condamne ma fuite mais ne voit pas mes pleurs
Je sais bien qu'il se meurt celui que j'étais hier.
Pourtant chaque folie en moi est légitime
j'ai acquis l'évidence de mon obstination
Et je commets sans cesse l'interminable crime
De n'être qu'une fuite, une destination.
Déjà dans mes empreintes fleurissent des statues
Les mémoires figées de mes instants déchus
Des rendez-vous ratés s'abattent en nuées
Sur ces photos de moi que j'ai désincarnées.
On s'attache à mes mues et je tombe en lambeaux
Alors que je serpente entre ces étrangers
Qui tiennent des miroirs menteurs fourbes et faux
Sur lesquels leurs visages sont à jamais gravés.
Je reste sur mon île apaisé dans la nuit
Ici tout est serein et ma vérité luit
Et je sens les trottoirs s'écouler sur ma vie.
Les boulevards agards me contournent et m'oublient.
Les remous que je laisse dans le flot d'une foule
Seront mes biographes les plus pertinents.
L'écume des regards blanchit sur cette houle
Et la ville s'éclaire sous ces rayons tremblants.
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