mardi 11 septembre 2007

Un souffle (Dial up)

Un souffle un jour naquit au creux d'une main tendue
Pour partir à tous vents habiller les cœurs nus.
D'un murmure il chantait à ceux qui n'ont pas cru,
La beauté d'une foi qu'ils n'avaient pas reçue.

Le souffle court, et en sifflant dans le silence
Il fait danser la mer, il fait fleurir les ondes
Il fait frémir les champs pétrifiés par l'absence
Se glisse entre mes lèvres et va pleurer le monde.

Avez-vous déjà pleuré le drame sombre du souffle, qui ne vit qu'en fuyant ? Il est seul, et fatigué de parcourir le monde. Mais le moindre repos l'évapore, il s'arrête et se dissout, s'évanouit et ne reparaît plus. Il dénude, on s'en protège, il décoiffe, on le maudit. Il n'est pas le parfum, il n'est pas la neige, il n'est pas la pluie, il n'est pas la musique... Il n'est rien de tous ces charmes faciles. Il n'est qu'un flux de vie anonyme, un facteur de mouvement, qui catalyse les beautés paresseuses. Il fait danser devant nos yeux passifs les touchants anodins en un ballet splendide, anime en silence le décor immobile, et raconte en murmurant l'histoire du bonheur simple.

Quand le souffle s'envole, loin, trop haut pour moi, sans que j'aie su le retenir, il emporte la lumière, et la nuit est mon dernier souvenir. Le monde semble dormir, le monde semble étouffer, les hommes semblent perdus, les hommes sont pétrifiés. Lui qui faisait le lien, lui qui était vecteur, conscience désincarnée, émissaire modeste et insignifiant, a fait taire les blés frémissants, et a fauché la mer en fleur.

L'élégante demoiselle qui fleurit les roseaux n'a juré à personne sa présence éternelle. Elle caresse une joue d'un frémissement d'aile frêle, envoûte en un éclair, se saisit d'un regard et déjà s'est enfuie. Mais elle a dans sa fuite projeté le regard dans un monde où l'on cherche, un monde où l'on espère, on monde où l'on croit, que sur chaque roseau fleurit une libellule.

Quand le souffle s'en va ne reste qu'un frisson, un souvenir d'émotion, une caresse anodine et inoubliable. Je sens encore longtemps le souffle joueur danser entre mes doigts trop froids. Mon sang se presse encore tout au bout de ma main pour se griser au vent d'une joyeuse inertie. Mais le souffle est parti et mon sang vient à stagner, et je surnage dans des marasmes où les roseaux peinent à se mirer dans une eau opaque et terne.

Heureux ceux qui savent aimer un souffle pour ce qu'il est, sans en vouloir à ses transports. Ceux qui se laissent sculpter par les beautés éphémères et indicibles. Ils portent en eux la chance, la providence. Ils figent les aléatoires merveilleux, comme un paysage de bord de mer fait pousser des arbres tortueux et torturés, pour faire de l'horizon un tableau en feu.

Comme un peintre se laisse impressionner par la magie fugace d'une lumière céleste, et mêle les images aux liants de son cœur, pour nous rendre en savants amalgames des couleurs ineffables qui rayonnent pour des immensités la splendeur d'un instant...
Comme le peintre donc ces être tendres se sont ouverts au chant d'un souffle. Ils n'ont pas crispé leurs paupières sous la beauté mordante du vent d'hivers, ils n'ont pas avorté les larmes qui naissaient de cette étreinte sans corps. Ils ont eu assez de foi en eux pour oser accueillir l'autre dérangeant, l'autre qui n'est pas, qui n'est plus, qui n'est jamais qu'en leur offrande.

Qu'ont-ils reçu du vent sinon la charge de répéter à chacun de leurs pas les mots qu'on leur
souffla, ces mots sans voix qui ne résonnent qu'en eux et qu'ils nous font enfin entendre.
Certaines musiques sont écrites pour les orgues, mais d'autres chants sont plus célestes. Les notes qui font chanter les cœurs en arias divins sont inaudibles à la foule. Les souffles sont des soupirs pour les froids interprètes, ils sont divins cantates pour les Hommes sans vanité qui savent respirer. Ceux là laissent entrer la beauté avant qu'elle ne se dévoile, la couvent et la font éclore, la réconfortent et la réchauffent, et pour un souffle froid qu'ils volent, nous rendent des alizés aux parfums délicats.

Je m'efforce aujourd'hui d'accorder mon âme pour chanter avec justesse la symphonie des souffles qui m'ont un jour croisé. Le souvenir indélébile de leurs caresses disparues habille mes heures de douces étoles de joie, et quand je pense à eux, partis si loin là haut, je me plais à rêver qu'en passant près de moi ils se sentirent aimés.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Un souffle fuit, et part, et repasse, et s’enfuit.
Les jours fragiles sont cousus de ces échanges.
Ce soir je ne dors pas je déguste le fruit
De la toute petite histoire de cet ange.


Je suis assis au milieu des docks désertés.
Je feuillette l’écran de sa nuit lumineuse.
Je n’en crois pas mes yeux mais mon cœur emporté
Sans peines les convainc de larmes silencieuses.


Il dit ; « A-t-on déjà pleuré le drame sombre
Du souffle qui ne vit qu’en fuyant ? » Je le pleure.
Je suis sur qu’il me voit,dépassé par mon ombre.


Il dit : « Je t’en prie mon ami ressemble-moi,
Rassemble-moi. » Je souris à cette douleur :
Nos miroirs nous partagent aux mêmes endroits.